tw drogue

Peut-être que t'arriveras jamais à t'échapper de cette ville de malheur. Chaque fois que tu tentes de changer tes habitudes, tu retombes dedans encore plus fort, encore plus vite, encore plus profondément. Il y a l'ambrume à laquelle t'es devenu addict et même si tu vois Simurgh, t'arrives pas à t'en défaire. Peut-être qu'un jour tu finiras comme ellui, incapable de vivre sans ta dose. T'es déjà comme ça, mais tu te dis que tu en consommes moins, que ça va encore, qu'il y a pire. C'est faux. Un jour tu ne seras plus qu'un junkie, seulement l'ombre de toi-même et tu disparaitra totalement. Toute façon, t'es voué à tomber dans l'oubli. T'es insignifiant. Tu le sais. Alors t'erres dans le marché et tu cherches l'un‧e de tes dealeur‧euses. Celleux qui te donne de l'ambrume contre une victoire à l'arène ou contre une nuit. La Nef des fous t'a sauvé, mais elle te tuera aussi. Elle prend chaque jour un peu plus. Il y a le corps de Maia plein de cicatrices et puis il y a le tien aussi. Il y a les douleurs qui n'en finissent plus que seule l'ambrume soulage un petit peu. Tu crèveras, seul, oublié.

Mais pas aujourd'hui. Pas maintenant. Pas sans te battre. Alors t'es de sortie et t'as récupéré Lior avec toi. Tu l'aimes bien. T'as pas besoin de trop parler avec lui. Toute façon vous êtes pas doués avec les mots. C'est plus simple de montrer les griffes et les crocs pour comprendre ce que vous voulez. C'est plus simple de se taire. Lior est de ces âmes perdues que tu ne sais pas remettre sur le droit chemin. T'es un monstre, tu l'entraînes avec toi dans ta chute. Gamins paumés devenus amis. Tu sais pas lui montrer le bon exemple. T'es pas un exemple. Jamais. Tu comprends pas trop comment les Greco ont continué à te faire confiance avec les années qui passent. Tu travailles encore pour elleux de temps en temps et ça te permet de pas passer tes nuits dans les arènes. Tu préfères pas réfléchir à tout ça, la priorité c'est survivre. C'est l'ambrume qui calmera les tremblements de tes mains.

Il y a quelques mois, t'as été bien amoché, Nobu t'a soigné, mais les blessures tirent encore. Maia est plus lente alors tu te cales sur son pas. Toute façon t'as pas le choix, sans elle t'y vois vachement moins bien. "Normalement, maon dealeur‧euse est par là, mais parfois iel s'installe ailleurs. Tu verras, iels est pas méchant‧e." Tu bouscules celleux qui sont sur ton chemin. Pas le temps de niaiser. Maia est un peu devant vous, elle reste plutôt silencieuse. Maia préfère ne pas trop attirer l'attention sur elle, ça lui permet de surprendre ses adversaires. Maintenant ça n'a plus grande utilité parce que vous commencez à être connu dans les arènes, mais tant pis.

Une main sur l'épaule, un sourire. Vous vous mettez à avancer. Le Greco te demande l'état de ton adversaire, de cellui qui a failli te tuer cette nuit-là. Quand Nobu t'as retrouvé dans les vestiaires, t'as cru que t'étais déjà mort. Mais t'as survécu grâce à iel et c'est plus qu'un mauvais souvenir. "Iel va bien, je crois. Iel était plus fort‧e que moi à vrai dire." Tu dis rien de plus, les yeux baissés vers le sol. T'aimes pas perdre, t'aimes pas être moins fort. Et surtout face aux autres. Tu te trouves un peu pathétique. Et tu caches tes mains qui tremblent encore. Tu veux pas qu'on te voit comme ça. Tu voudrais ne pas être cet addict qui ne sait plus vivre sans sa dose, ce combattant au corps zébré de cicatrices. Tu voudrais avoir une vie différente.

On obtient jamais ce qu'on veut. Tu trouves taon dealeur‧euse et tu lae salues. Iel te propose de l'enclair avec ton ambrume. Peut-être que c'est parce que Lior est là lui aussi. D'habitude, iel te donne juste ta dose et te félicite pour tes combats, ou iel te donne rendez-vous chez ellui la nuit. Tu t'arranges. Tu baisses de nouveau les yeux. "Non juste l'ambrume, tu sais que j'ai rien pour payer." Tu te tournes vers Lior et tu lui parles à voix basse. "Iel nous propose l'antidote de l'ambrume, mais j'ai rien à lui échanger. Tu as quelque chose toi ? Et ça te gêne d'avouer que tu n'as rien. T'es qu'un raté. Tu récupères quand même ta dose et t'espères que Lior ne t'en voudras pas. T'es prêt à partager avec lui ou à le laisser négocier avec lae dealeur‧euse. Tu veux pas t'immiscer dans ses affaires. Il a ses raisons pour commencer l'ambrume, et t'es pas là pour le juger.

Les doses d'ambrume récupérées, tu t'éloignes de lae dealeur‧euse avec le jaguar. Lui non plus n'a pas pris l'enclair. Toi, tu sais que tu devrais y faire attention, mais t'arrives à te sortir de potentielles overdoses avec de la naloxone. L'enclair est trop chère, trop rare, ça ne vaut pas le coup. "J'aimerais me trouver des anti-douleurs, l'ambrume c'est efficace, mais je préférerais éviter d'être trop dépendant. Puis après on se trouvera un coin tranquille t'inquiète." Tu annonces la couleur. L'ambrume, tu sais que ça a une emprise sur toi et tu voudrais pas sombrer. Tu voudrais pas que quelqu'un‧e aie à te ramener d'entre les mort‧es. Tu as trop vu Simurgh en pleine overdose pour le souhaiter à qui que ce soit d'autre.

Vous êtes interrompu par unæ vendeusæ qui propose des herbes et autres joyeusetés utilisée dans les potions. Il y a parmi sa sélection des ingrédients du Cinquième Monde et Lior lui offre ce qu'elle demande pour la faire taire. Un fin sourire se dessine sur tes lèvres. "Si tu cèdes à chaque fois, iels vont pas te lâcher. Ici iels sont bruyant‧es, mais c'est pour avoir les client‧es à l'usure." Tu plaisantes un peu. Lior a pas l'air super à l'aise et tu te demande si tu devrais pas être un peu plus attentif. Tu sais pas tout le temps y faire avec les mots, toi tu parles avec tes poings.

Alors que vous tournez dans une nouvelle allée, la rumeur court que la milice va faire une descente. Certain‧es s'en vont, mais toi tu préfères rester au marché. "T'inquiète pour la milice, la moitié du temps iels ne viennent pas. Suffira juste de se planquer ou de courir vite si iels arrivent." Tu avances dans la rue, serein, faut que tu retrouves cette échoppe qui vend des simples. Ça te servira sûrement pour te faire des cataplasmes après les combats à la Nef. "T'as eu des adversaires intéressants dernièrement ? J'ai l'impression de voir toujours les mêmes personnes à la Nef, ça devient lassant."

Tu ne t'inquiètes aucunement de l'arrivée possible de la milice. Tu connais bien mieux les rues de la Ville Basse qu'elleux et tu sais que tu pourras fuir sans mal s'il le faut. Lior est de ton avis et se vante même que vous pourrez les distancer en un rien de temps. T'hoches de la tête dans un rire. Il a pas tort. "Iels se ramollissent dans leur caserne et iels ne savent que de se servir de leur alchimie." Tu plaisantes, mais en même temps, tu te dis que toi tu es bien mauvais alchimiste. T'es incapable de comprendre les pentacles les plus basiques et tu ne sais pas y faire. T'as jamais pu apprendre et tu n'as clairement pas les connaissances nécessaires pour devenir un alchimiste compétent. Peut-être qu'il faudrait que tu testes la drogue immortelle pour devenir haruspice. Au moins t'auras peut-être un don qui te sera véritablement utile.

Tu finis par demander à Lior s'il a eu des adversaires intéressants dernièrement. Tu voudrais te sortir des arènes et ne plus croiser tout le temps les mêmes personnes. T'es pas le combattant ayant le plus de victoires, mais à force, tu sais un peu quel est ton niveau par rapport aux autres. T'aimerais te frotter avec des inconnu‧es pour changer un peu. Cependant, le Greco ne répond pas à ta question et t'en pose d'autres à la place. Tant pis. "J'en ai un demain soir. Je vais me battre contre une femme qui se fait appeler Letteria. Je crois que c'est un pseudo. Elle a un daemon loup et je sais pas si Maia fera le poids. On a pas beaucoup combattu ensemble, je la connais pas bien." Tu te grattes la tête et jettes un regard à Maia. T'es pas super confiant, mais tu sais que vous trouverez bien un moyen de vous en sortir. "Oui, tu peux venir. Si tu veux, je viendrais te chercher au port. Et à la fin ça dépend. Déjà, faut voir si ça a rapporté beaucoup niveau pari, et en fonction on gagne une partie des mises. Souvent, j'utilises ça pour l'ambrume et c'est un peu un cercle vicieux... Je suis pas sûr que tu devrais t'engager sur cette voie. Les arènes c'est drôle un temps, mais on en sort pas comme ça. Tu sais, certains combats sont mortels. Je préfère que tu sois au courant de tout avant que tu prennes la décision de combattre."

Lior essaie de te rassurer et tu sais que c’est gentil, mais tu trouves aussi que c’est terriblement naïf. Tu ne lui en veux pas, tu sais que c’est plus simple pour lui. Peut-être qu’il ne s’est jamais retrouvé au bord de la mort. Toi tu ne comptes plus. Il n’y a pas encore d’overdoses, mais peut-être qu’elles viendront bientôt. Pour l’instant, tout ce qui a failli te tuer, c’est les combats et les bagarres que tu déclenches parce que tu ne sais faire que ça. Tu voudrais le mettre en garde, lui faire comprendre que les combats à la Nef ça sauve mais ça détruit tout à la fois. Ça t’a sorti de la rue, mais ça t’a surtout coincé à un autre endroit où il faut chaque nuit que tu te donnes, que tu risques ta vie. Et puis, avec ta consommation d’ambrume, iels te tiennent. Tu ne pourras pas sortir de là si facilement. Faudra que tu épanches tes dettes ou que tu disparaisses. Tu secoues la tête. Tu vois bien que Lior n’est pas réceptif. Tant pis, tu auras au moins essayé.

Dans une ruelle, vous tombez sur plusieurs addicts. Iels sont presque en overdose, la mort pourrait se saisir d’elleux. Tu remarques la silhouette du médecin qui te troque parfois de la naloxone. Ça aide pour les overdoses et tu sais que Simurgh en utilise souvent. Tu essaies d’en avoir un peu toi aussi, même si tu ne t’en sers pas encore. Seulement, tu sais qu’un jour tu iras trop loin. « Je me suis promis de ne jamais dépendre de l’ambrume comme elleux, mais c’est déjà trop tard… » que tu murmures à l’intention de Lior. Il ne te prendra certainement pas au sérieux. Toi aussi, tu pensais que tu arriverais à ne pas tomber dans l’addiction. Tu te croyais plus fort que les autres. La vérité c’est que tu es un junkie. Tu ne sais plus vivre sans ta dose. Tu remercies le médecin qui te tend une fiole presque vide de naloxone. Ça pourra ramener Maladoror d’une overdose, peut-être deux. Tu glisses le récipient dans ta poche. « Je crois qu’on a fait le tour. Je connais un café pas loin. J’ai créché chez la proprio une ou deux fois quand j’étais gamin, elle m’aime bien. Son café est infâme, mais ça fera le taf. » Tu entraînes le Greco à ta suite dans un dédale de ruelle avant de tomber sur une placette. Un petit olivier trône en son centre et il y a quelques tables dehors. Tu t’installes et demandes de quoi boire et des petits gâteaux. « Je te présenterai à l’Absent‧e des combats ce soir, si tu veux. »

Tu aimes bien la placette avec l’olivier. Tu sais qu’il y a une cour pas loin avec un piano. L’instrument est totalement désaccordé et usé par le temps. Tu as essayé de le retaper un peu, parce que tu aimes bien comment ça résonne là-bas. La propriétaire jure comme une charretière, mais c’est parfois le cas des commerçant·es de la Ville Basse. Toi, tu y es habitué et ça ne te perturbe pas plus que ça. Tu sais qu’elle ne ferait pas de mal à une mouche. Tu t’installes à l’une des tables, Lior toujours à ta suite. Tu regardes l’olivier. Il a toujours été beau cet arbre. Il n’est pas bien grand, mais ses feuilles sont bien vertes et quand il sera fleuri, il y aura plein de petits points blancs.

Tu proposes à Lior de lui présenter l’absent des combats ce soir. Tu ne sais pas trop ce qu’il va se passer après ça. Ce ne sera pas le premier gars que tu ramènes à la Nef pour des combats. Tu te dis qu’avec sa forme inkumboli, Lior pourrait faire sensation et que le public appréciera de voir une panthère se battre dans les arènes. Oui, tout devrait bien se passer. Tu es un peu secoué d’avoir vu de nouveau junkie au bord de l’overdose. Parce qu’à chaque fois, ça te rappelle Simurgh. Et à chaque fois, ça te fait angoisser. Peut-être qu’un jour tu n’arriveras pas assez tôt pour lae sentir de là, pour lae sauver. Le bruit de la chaise sur les pavés te sort de ces pensées sombres. Lior se rapproche de toi, il finit presque coller à toi. Tu sais qu’il est tactile, il est comme ça et ça ne te gêne pas vraiment. Lior a quelque chose de naïf que tu apprécies. Il te semble trop lumineux pour trainer avec toi. Seulement, il se bat bien et ça te suffit.

« Ok, ça me va. Ça fait longtemps que j’ai pas mangé un poisson cuisiné par un Greco ! » L’idée te plait instantanément et ça te fait sourire. Tu ne doutes pas vraiment que vous réussissiez tous les deux à gagner, alors tu te dis que c’est déjà bon pour le poisson. Ça te motive pour la fin de la journée. Vos boissons et des petites pâtisseries vous sont servies. Tu avales une gorgée avant de te retourner vers Lior. « Tu sais, je pense que tu ferais un fier combattant ! Je suis peut-être un peu barbant à te mettre en garde constamment, mais je crois que j’aurais aimé que quelqu’un·e fasse ça pour moi. Faut pas que tu te laisses emprisonner par les arènes, ni par l’ambrume d’ailleurs, c’est trop facile de perdre le contrôle. » Et tu dis ça parce que tu as Simurgh sous les yeux constamment. En lae regardant, tu vois ce que tu pourrais devenir si tu ne ralentis pas. Tu ne veux pas que Lior vous suive sur cette pente.