✗ Outlaws

« Bordel, iel ne t'a pas loupé, se plaint presque Mercy quand elle voit Azur au bar de la Nef, à la fin de son service - à l'entendre, on pourrait croire que c'est elle qui a mal : pourquoi tu te mets toujours dans des états pas possibles ? » Le ton est rugueux, dur sur la voix cassée de la zutique - mais tout a toujours été un peu rude chez Mercy. Elle est comme ces statues taillées à grands coups de burin et de marteau, comme ces récifs tranchants formés par la mer. La vie l'a façonnée ainsi, corps et âme, toute d'angles coupants. Pourtant, derrière les gestes qui viennent éponger le sang et panser les plaies, il y a une certaine douceur, une attention particulière à ne pas aggraver les blessures. « Elle veut dire qu'elle est contente que tu soies encore entier, Azur. » Intervient Yil, interprète plus tempéré de Mercy, verbalisant ce que la gestuelle trahit déjà. « Et elle le serait encore plus si tu arrêtais de te faire démonter, crétin. » Ajoute-t-elle, immédiatement à la suite de la daemon, pour faire bonne mesure à la sympathie de la gecko.

Habituée à l'exercice, elle termine rapidement le dernier pansement. « Merde. Il n'y a plus d'anti-douleurs. » Un regard s'égare sur Azur et semble évaluer quelque chose avant qu'elle n'ouvre la bouche à nouveau : « Tu viens les chercher avec moi chez les Noénautes. » De l'avis de la poétesse, il n'est visiblement pas assez abîmé pour être dispensé de venir chercher avec elle sa médication.

Il l'est assez, en revanche, pour qu'elle fasse exprès de ralentir le pas, elle qui marche toujours vite à travers rues et ruelles de la cité. « La prochaine fois, je te laisse comme ça » Glisse-t-elle entre ses dents alors qu'iels s'infiltrent dans les jardins noénautes. Et pourtant, l'un‧e et l'autre savent que la prochaine fois, comme toutes les autres fois, elle l'engueulera et le soignera.

T'as pris cher. Encore. Toujours. C'est devenu habituel. Tu te fais démonter à la Nef, tu finis en sang, mais t'y retournes. Parce que tu sais pas faire autrement. Et puis quand t'y vas pas, c'est parfois Simurgh qui t'éclate la gueule dans ses accès de colère. C'est comme ça. C'est ta vie. Tu sais pas faire autre chose que te battre, cracher du sang avec un sourire narquois et recommencer. Encore et encore. "Iel tapait un peu fort, mais c'est rien j'te jure." Et il y a Mercy qui peste, qui s'énerve, qui s'inquiète. Toi, tu fais semblant de pas t'en rendre compte. T'as l'arcade sourcilière en sang, le nez cassé et les poings éclatés d'avoir trop tapé. C'est rien. Maia est à tes pieds, elle aussi s'est battue. Parce que si l'un‧e se lance dans la bataille, l'autre lae suit immanquablement. "Tu devrais voir la gueule de l'autre." T'as un sourire de petit con. T'es un petit con. Et Maia qui souffle. "Sans toi, je crois qu'on serait déjà six pieds sous terre..." Elle est pas la meilleur placée pour parler. Elle le dit quand même. Et toi, tu saurais pas quoi faire si tu te battais plus. Tu lui dis pas à Mercy. Tu veux pas qu'elle t'envoie chier. Peut-être qu'un jour, elle en aura marre de te rafistoler. Elle te retrouve souvent dans des états possibles.

Elle désinfecte la plaie que t'as au niveau de l'arcade et tu grinces des dents. Ça fait un peu mal. T'as un petit mouvement de recul. "Hé ! Doucement !" Ton nez a été remis en place, ça te lance un peu, mais t'es habitué. T'as trop souvent eu la gueule cassée. Et puis, l'autre de te dire qu'il n'y a plus d'anti-douleurs. Elle veut que vous alliez en chercher chez les noénautes dans leurs jardins botaniques. L'idée te fait un peu rire, mais en vrai, tu voudrais retrouver ton lit ou même le canapé du théâtre. "On est obligé ? Je suis sûr que je peux en voler à Sim." Tu fais l'enfant, un peu capricieux, un petit con. Finalement, tu las suis quand même.

Elle avance plus lentement qu'à l'habitude et toi tu te plains. Vous vous chamaillez souvent, tout le temps, avec Mercy. Tu lui fais confiance. "La prochaine fois tu me soigneras encore, on le sait tous les deux." Nouveau sourire goguenard. Et vous débarquez enfin aux jardins. Il y a les parterres en fleurs et tu en piques une que tu glisses entre les doigts de Mercy. Comme un merci silencieux. L'endroit est plein de couleur et t'oublies un peu la douleur de ton nez cassé et de tes côtes fêlés. Tu vis pour ces moments-là, entre deux bagarres où tu te sens un peu moins seul.

✗ Outlaws

Tu es en colère contre Azur. D'aucun‧e‧xs diraient que la colère, c'est un peu ton état permanent, c'est à ça que tu tournes, c'est ce qui te fait avancer dans cette satanée vie. La colère, c'est juste l'emballage autour d'une myriade de sentiments, d'une tornade d'émotions. Alors si tu t'énerves contre lui, c'est surtout parce que sous la colère, il y a un dégueulis d'inquiétude pour lui. Un jour, il n'en reviendra pas à force de faire le con, tu lui répètes tout le temps, à ta façon, avec des mots tranchants autant qu'avec des gestes tendres. Mais il s'entête, il ne t'écoute pas - et ça attise ton inquiétude ta colère forcément.

« Désolée de ne pas pouvoir te soigner. » S'excuse le lézard gecko à la panthère nébuleuse, sincère, alors que tu finis tes soins de fortune sans prendre en compte les jérémiades d'Azur. « Est-ce que tu as mal, Maia ? »

Quand il te demande si vous êtes obligé‧e‧xs, la main vient lui coller une claque dans l'épaule, pas fort mais juste assez pour le forcer à se lever du coin de table où tu le soignes. Tu veux lui lancer une autre remarque acerbe (quelque chose sur le respect de ton travail, le fait de ne pas saboter les soins que tu lui fais gracieusement) mais ton daemon te devance : « Elle a peur que vous ne preniez rien et que toi et Maia réveillez dans un sale état demain. » Yil fait le sous-titrage, dévoile l'affection qui se cache derrière les chamailleries et les mots durs.

« Tu crois m'amadouer avec une fleur ? » Tu demandes, sourcil arqué, en fixant la fleur offerte mais le ton est déjà plus doux, les mots ont perdu leur tranchant alors que ta main s'empare quand même de la plante et que ton cœur accepte le remerciement.

Vous arrivez sur au niveau de parterres de plantes-racines et tu espères passer discrètement, que personne ne vous repèrera au milieu du brouhaha d'enfants, mais un‧e jardinier‧ère vous appelle : « Eh vous ! Venez m'aider ! » et même si tu as envie d'ignorer la personne, tu t'exécutes : tu confies la fleur que tu tiens à Azur et tu vas jouer la bonne poire noénaute pour ne pas attirer l'attention sur vous. D'un pas, tu es près de lae jardinier‧ère et tu suis ses instructions pour l'aider. Ca ne prend pas plus d'un ou deux minutes (heureusement) et tu retrouves Azur en tapant tes mains terreuses l'une contre l'autre : « Filons, je n'ai pas envie de l'aider à déterrer le reste de son parterre. »

Yil s'inquiète de la panthère nébuleuse et elle lui répond d'un coup de tête. "Non j'ai quasi rien. Le daemon de l'autre était ridicule. T'aurais dû voir sa tête quand j'ai sortie les griffes." Sa remarque te fait rire puis grimacer parce que ça secoue tes côtes déjà abimées. Maia est tellement plus fort‧e que toi, sans elle, tu serais mort plus d'une fois. Et sans Mercy aussi. Elle te pousse pour que tu te lève. Pas fort, mais suffisamment pour que tu sois forcé de la suivre. Et malgré les mots durs, tu sais que c'est parce qu'elle se fait du soucis pour toi. D'ailleurs le gecko vous l'annonce honnêtement. Elle ne veut pas que vous vous réveillez le lendemain perclus de douleur. Tu ne dis rien, mais tu lui es reconnaissant. Toujours.

"Je me suis dit que cette couleur irait bien dans tes cheveux. Et puis tu ferais un peu moins peur aux client‧es à la Nef." Nouveau rire qui secoue tes épaules. Si Mercy était une fleur elle serait une rose avec toutes ses épines. Elle fait mal, se pare de sa colère pour se protéger et tu te sens tellement compris quand t'es avec elle. Vous êtes pareil. Colère sourde, violence, incapables de dire ce que vous ressentez vraiment.

Un‧e jardinier‧ère vous demande de l'aide à déterrer un arbre. T'es prêt à t'avancer, mais Mercy te confie la fleur et te laisse l'attendre. Tu grommelles que tu aurais pu le faire, mais ça t'arrange de ne pas avoir à forcer. Pas avec tes blessures. Elle revient bien vite et vous vous éloignez rapidement. Et vous voilà bloqués par un mur de lianes épaisses. "Iels ne s'occupent pas super bien de leurs plantes. Celle-ci sont bien trop hautes." Tu sors un couteau, accroché contre ta cuisse et tu vous tailles un chemin. "T'es sûre qu'il y a des anti-douleurs dans le coin ?" Et tu râles encore, parce que tu peux, parce que t'as le droit.

couteau rouge Large lame dont les blessures ne peuvent se refermer qu'avec l'aide de la sorcellerie.

✗ Outlaws

Un rire t'échappe, dérape d'entre tes lèvres. « Et pourquoi je voudrais faire moins peur aux client‧e‧xs ? » Retorques-tu, les mots un peu javel. A la Nef, ce ne sont pas les pourboires qui pleuvent, pas pour les serveur‧se‧xs en tous cas. Et si ton physique marqué par la faim et la maladie tient éloigné les mains baladeuses et les esprits échauffés qu'elle est chargée d'abreuver en alcool toute la nuit, tu aurais bien tort de te priver de rester laide. « Ariel a essayé des dizaines de fois déjà, Mercy ne veut rien entendre. » En propositions timides ou plus franches, ta sœur a de multiples fois tenté sa chance, te proposant de t'arranger, de te rendre plus jolie. Mais la beauté, tu t'en moques. La beauté distrait - toi, tu veux déranger et tout chambouler.

Tu attends patiemment alors qu'Azur vous taille un passage à travers d'épaisses lianes rouges. « Tu penses que ce serait plus intelligent d'aller voler des potions chez une sorcière ? » Un sourcil s'arque - en tous cas, toi, tu n'as pas de quoi en troquer. Toute ta paie est passée dans du papier et de l'encre pour la prochaine action du Collectif. Tu t'apprêtes à le préciser au pianiste quand vous vous faites héler à nouveau et tu te retournes, agacée d'être interrompue pour une autre broutille. « Merci beaucoup ! » te remercie lae jardinier‧ière quand tu finis de l'aider à déraciner son foutu plant de mandragore. Mais tu es déjà repartie vers Azur que tu entraînes plus loin : « On va finir par déraciner tout leur fichu jardin à force. » « Tu exagères, Mercy ... » « A peine. »