L'envie lui avait gratté l'intérieur de la gorge, à l'instant même où iels avaient remis un pied sur le sol du hall de la Bibliothèque, la dernière fois. Comme un démon intérieur qui s'installe, et grignote ce qu'il trouve devant lui, ronge les entrailles jusqu'à ce qu'il ne reste plus comme solution que de céder à ses pulsions. Attendant patiemment qu'on le nourrisse suffisamment de toutes les craintes et les merveilles que la hâte peut susciter.
Et Skye avait profondément hâte, là où Cornelius tenait tête à ne pas vouloir retourner dans cette pièce des Enfers. Entre menaces et pots-de-vin, le singe avait fini par accepté de revenir dans la Chambre Inversée, à condition qu'il soit dans un sac de tissu accroché au cou de Skye et qu'iels ne se séparent sous aucun prétexte.

Elle avait attendu que la Bibliothèque soit presque vide pour s'y rendre, armée de quelques objets pour pouvoir se défendre. Cees en était le gardien, et tenait fermement entre ses pattes le manche d'une Lame Tartare, terrifié. Skye, elle, bouillonnait d'une impatience nouvelle, de celle qui la faisait se sentir vivre, enfin ; comme un second Baptême inespéré qui lui offrait l'absolution dont elle avait tant besoin après ces dernières semaines et mois d'errance, de questionnements. Ces mois de perdition.
Dès ses premiers pas dans les escaliers, le vent s'engouffre et fait voleter sa jupe. Un sourire aux lèvres, elle descend dans de fortes respirations, et se voit bien heureuse de retrouver son fil de Penrose exactement là où elle l'avait laissé. Ses mains viennent glisser contre la laine, donnant quelques derniers regards à la Chambre initiale, la première, comme pour n'en perdre aucune miette et être capable de la comparer dans sa mémoire à celles qui s'apprêtent à lui succéder. « J'y vais. ». Dans le sac, elle sent Cornelius qui se secoue, qu'elle imagine parfaitement se mettre en boule, et dépose une main contre le tissu comme pour qu'il se sente un peu plus protégé. De la seconde, elle actionne le levier.

Les chambres s'enchaînent, avec chacune leurs particularités, mais c'est comme poussée par un instinct étrange que Skye continue d'actionner le levier jusqu'à la dernière chambre, jusqu'à ce que le fil ne disparaisse presque et les laisse, elle et son dæmon, au beau milieu d'une copie au goût amer.
Comme pour la première fois avec Zen et Eunice, Skye ouvre son sac, demande à Cees de lui donner la loupe, et elle commence à observer chaque recoin : livres, tables, objets et tapisseries. Un instant, elle se souvient également de la présence d'une serrure qui les avait longuement perturbé, et c'est alors ce qu'elle se met à chercher en touchant chaque mur, chaque pierre, comme pour en sentir l'histoire. Des mots qu'elle lit, elle prie pour obtenir une vision ; des recoins qu'elle touche, elle espère déceler des aspérités qui la mèneront jusqu'à de nouvelles réponses à des questions qu'elle n'osait pas même imaginer.
De ses découvertes, elle se voit déjà devenir Évêque, et son sourire, alors, ne la quitte plus.

loupe de galilée Une loupe révélant quelque chose de caché dans un rp, une mission ou une intrigue globale. Utilisable une seule fois par rp.

#staff

L'air sort des poumons de la Rectrice avec la vitesse d'une balle. A chaque doigts qui effleurent les murs dans ses recherches, ou les tapisseries, des frissons comme venus d'anciens mondes lui grimpent le long de l'échine. Enfoui dans son sac, le singe joue à l'un de ses trois frères bien connu en bouchant ses oreilles de toutes ses forces, les yeux fermés. Dans son cœur qui bat trop fort, il y a la crainte irréelle de mourir à tout moment, qu'un faux pas de l'humaine ne lui arrache là vie à lui aussi ; ce lien qu'iels chérissent, juste pour une seconde, lui semble fardeau injuste, et il se hait un peu de vouloir le briser.

Mais rapidement le cœur de Skye s'allège devant des ébauches de réponses, bien qu'elles créent de nouvelles interrogations, et avec lui, celui du petit animal, qui sort une tête curieuse. « Il... Il s'est passé quoi ? Il demande, en ayant senti la liberté remplir ses veines. Il y a une serrure, Cees... Ou un couloir, avec une porte. Je vais où ? ». Pour l'un comme pour l'autre, il faut de quoi l'ouvrir. Dans le sac, le singe sait qu'il y a de quoi faire, mais en essayant de bomber le torse malgré sa peur qui continue de lui tenir au corps, il murmure doucement un unique mot aux syllabes hachées. Une grande main vient se poser sur sa tête, gratouille derrière les oreilles de quelques caresses affectives, et les pas s'emboîtent vers la destination choisie.


Echec : Direction le couloir et la porte, Skye utilise une Lame Tartare que Cornelius lui tend, pour essayer de trancher l'acier des gonds et faire sauter la porte.
Succès : Direction la serrure, Skye utilise alors la Clé Narcisse tendue par Cees.

Le mot porte résonne au fond du sac, et Skye se dirige alors sous la tenture, qu'elle bloque pour rester ouverte avec l'aide d'un des livres lourds de la Bibliothèque. Il ne manquerait plus qu'elle se retrouve à devoir courir pour retrouver la pièce, pressée par un danger imminent, mais ne s'emmêle dans la tapisserie en arrivant.

Le tunnel est sombre, minuscule. Cees y serait un bon éclaireur avec sa petite taille et ses yeux qui y voient sûrement mieux que ceux de la Pandémoniques dans la pénombre. Mais il n'y a que le bruit sourd des talons des chaussures bien cirées qui résonnent. Pas une respiration, un seul petit rai de lumière qu'elle suit du bout des yeux, s'échappant de sous la porte qui clot le couloir. En avançant lentement, lame à la main, Skye tente d'ouvrir la porte. Si celle-ci demeure fermée, elle y glissera lentement sa Lame Tartare le long des morceaux d'acier, en priant l'Autorité pour que, comme on la lui a vendu, elle ne découpe le métal comme du beure et permettre de faire sauter les gonds pour découvrir la pièce et le monde de derrière.

La lame, toutefois, resterait brandit droit devant elle ; juste au cas où.

lame tartareUne lame forgée en fer de ciel, extrêmement résistante et effilée. Elle est capable de trancher l’acier.

Echec : La porte n'est pas ouverte, Skye utilise donc sa lame en priant pour que ça fonctionne. Eventuellement, elle arrivera à ouvrir la porte sans se faire mal, selon l'humeur de l'être caché
Succès : La porte était en réalité tout simplement ouverte, ou est très facile à ouvrir grâce à la lame, puisque le métal est probablement ancien ; Skye entre dans l'espoir d'aller fouiller ce qu'elle découvre derrière.

#staff

La sensation de la lame qui s’enfonce est presque douce, comme couper la juste quantité de beurre dans ses souvenirs d’enfance où elle cuisinait des sucreries en compagnie de sa mère. Mais derrière la porte, on quitte le passé et vient s’ancrer dans un présent entre terreur et curiosité carabinée. A la vue des merveilles qui se trouvent dans la serre, un sourire se dresse entre les pommettes de Skye. Quelques rires, générés par la surprise, se fraient un chemin entre deux soubresauts stupéfaits. Elle qui craignait les monstres et les cauchemars se retrouve bercée dans un rêve éveillé, baignant de lumière et de vent. Une courte seconde, elle ferme les yeux et ne bouge plus, reste là dans le havre d’une paix qu’elle n’espérait pas.

« Cees… Sors de là, il faut que tu voies ça. ». Les paumes tournées vers le plafond qu’elle ne discerne pas, qui se lèvent doucement en majesté, viennent accentuer le sentiment de se trouver dans l’une de ces scènes qu’elle a lu et relu. Un miracle, une religiosité indéniable, peut-être bien au pied du royaume de l’Autorité qui l’accueille enfin.
Le singe, bien que terrifié, écoute l’humaine et sort un morceau de tête avant de lui aussi tomber des nus devant la beauté de ce qui les entoure. Bientôt entièrement hors du sac, comme tiré par une force aimantée invisible, il grimpe sur son épaule. « Mais qu’est-ce que- Comment ? - Je ne sais pas. Je ne sais plus rien, pour tout dire. Peut-être qu’on trouvera des réponses dans la chambre, mais regarde moi tout ça… Toutes ces… espèces. Y a-t-il encore assez de place dans le sac ? ». Le daemon se laisse glisser à l’intérieur de la besace et en ressort aussitôt en hochant positivement la tête, puis il descend et commence à s’avancer vers les nombreuses plantes pour essayer d’en récolter quelques ingrédients.

Skye lui murmure de faire attention, iels ne savent pas si quelque chose n’est pas vénéneux, qu’iels doivent rester prudent·e·s. De précautions en précautions, alors, Cornelius commence sa récolte dans ses petits bras. Derrière lui, les paupières de sa maîtresse se gorgent de larmes alors qu’elle regarde en direction du courant d’air. Il y a un monde ici, quelque chose de nouveau à découvrir, qui est peut-être plus beau et plus doux. Des yeux, elle recherche alors des marches, un chemin, une échelle… N’importe quoi qui pourrait la rapprocher de ce nouveau paradis, lui faire oublier les Enfers de Cittàgazze.

Elle a déjà reconstruit sa vie quelque part, elle serait tout à fait capable de le faire de nouveau, si cet  univers-là s’avérait bien plus clément.

réussiteAssure la réussite de votre action ou de votre sort, quel que soit le résultat des dés.

#staff

Sous les merveilles, sous les interrogations, les envies et les hypothèses, Skye en oublie le temps. Lui qui s'écoule et menace, lui qui joue contre elle et ses envies de découvertes, derrière lesquelles même Cees se retrouve emballé à son insu, tête levée hors du sac alors qu'il vient d'y enfermer précieusement, dans des petits sachets individuels, quelques curiosités. Iels trainent des pieds, oublient la trotteuse des secondes qui s'écoulent et souhaiteraient bien rester là, bordés au coin du rayon de soleil qui traverse la serre et vient caresser doucement le visage. Un soupir ensommeillé si agréable, un rêve éveillé.

Mais le temps, si soudainement, se rappelle à elleux et les entraînent dans ses méandres lorsque se vent devient lourd et chargé d'une électricité toute autre. Skye se retourne brusquement, comme dans cette impression d'un sens qui s'éveille sans être certaine duquel ou de comment. Elle rebrousse chemin, le cœur lourd et les larmes gonflées sous ses paupières d'où elles ne coulent pourtant pas. On reviendra, disent ses yeux en regardant Cornelius, qui partage la même mélancolie d'un instant qu'iels savent plus éphémère encore qu'un papillon.
Et dans la salle de la chambre inversée, les doigts avancés vers la serrure dérobée sur le mur, Skye sent la chaleur qui l'intrigue de plus en plus. « Ne le fais pas. », murmure le singe, mais déjà, les doigts de la rectrice sont plongés dans son sac, retenus par la trop faible force du daemon au regard inquiet, quand ils sortent de là avec la Clé Narcisse au bout des phalanges.

Skye inspire. Elle sort délicatement Cees du sac à main, le dépose sur le bureau et lui tend ce regard doux, qu'elle ne réserve qu'à lui. « On peut regarder encore un peu si on ne trouve rien ici, tu as raison. ». Les mensonges sonnent amers, mais elle prend ces quelques minutes promises pour balader ses doigts contre les livres, ouvrir les tiroirs, voir s'il n'y a rien à récupérer comme Indices.

Après quelques instants, toutefois, alors que Cornelius regarde ailleurs, elle ne peut se résoudre à abandonner et tourne la clé qu'elle sait inondée d'une magie qui la dépasse et lui permettra de dompter la serrure fermée. Elle pousse la porte dans un grincement des enfers.
Terrifiée, elle serre dans sa main, non plus sa Lame Tartare qui lui a permis de faire sauter les gonds de la porte, quelques minutes plus tôt ; mais son Couteau d'Ivoire, bien plus menaçant contre les monstres et les cauchemars du Cinquième Monde.

clé narcisseUne clé capable d'ouvrir n'importe quelle serrure, avant de se briser.

couteau d'ivoireCouteau d'un lame d'un blanc nacré, une arme ne laissant aucune trace en infligeant des blessures, rendant impossible de déterminer la cause d'un meurtre.

IndiceObtention d’un indice sur la prochaine intrigue du forum. Carte à jouer par mp à l'Être caché.

#staff

Spoiler:

Le couteau entre ses doigts, qu'elle tient avec fermeté devant la crainte de se confronter à un monstre, perd toute son utilité : ce n'est pas un monstre qui lui fait face, alors que la porte s'ouvre sur le chaos, c'est la fin. En un coup d'œil, Skye abaisse la lame, lentement. Elle reste bouche ouverte, incapable de parler, alors que ses lèvres dessinent un O parfait et grandissant à mesure que son menton tombe et se retrouve attirer par la gravité qui pourtant disparaît. Le long de sa cuisse, la lame demeure luisante et reflète les flammes qui dansent depuis les enfers. Car la porte était finalement celle gardée par Cerbère, celle qui permet d'accéder au centre de l'univers, dans ces tréfonds à la fois minuscules et interminables. Une ouverture vers la damnation.

Cornelius n'a presque pas sorti la tête du sac qu'il a porté ses mains à sa bouche, tenté de retenir son souffle saccadé et ses pleurs qui sont montés instantanément. Ce n'est pas la tristesse de perdre ce monde inconnu et ses quelques connaissances, même si au fond du cœur de la Réctrice amoureuse des livres et de leur mémoire, il y a une peine devant cette simple pensée. Ce qui fait pleurer le singe, à l'inverse, c'est cette preuve irréfutable que l'Effondrement est finalement multiple. Qu'il menace. Qu'il détruit. Et qu'il mène droit au feu éternel.
Cittàgazze, ainsi, est bien ce Purgatoire comme Skye l'a toujours pensé, cette étape absurde de purification pour mener son âme au Paradis. C'est ici que tout se passe, ici que tout peut changer. Ici que tout se joue et que tout s'écrit.

Devant les mots du survivant qui n'en est bientôt plus un, une larme coule sur la joue de la Pandémonique. Elle se recule, refuse de se faire attraper par les mains baladeuses déjà damnées : elle vivra pour faire perdurer les mémoires, prendra avec elle autant de livres qu'elle le pourra, autant de reliques. Autant de souvenir et de vies. A force de petits pas en arrière, elle finit par vaciller et tomber, s'assoit sur le sol en regardant le déchirement non pas d'une personne mais d'un monde tout entier. Avalé pas le néant, qui tire lentement la porte à lui et referme à jamais la civilisation.
Elle n'a pas les mots. Même ses pensées se brouillent. Assise-là au centre de rien, Skye est prise d'une terreur qu'elle n'a jamais vraiment vécue. C'est la première fois, que de ses yeux, elle voit une preuve de l'Autorité et de sa suprématie. Alors son cœur, presque, s'arrête. Son souffle s'apaise. Ses yeux se sèchent. Mais son âme, elle, trop nourrie de ses espoirs de mériter l'absolution, se vide lentement à présent que tout perd encore plus de son sens. Comment l'Autorité peut-elle laisser un monde entier être détruit ainsi, sans aucun·e survivant·e, alors qu'il suffirait d'en laisser quelques-un·e·s franchir cette porte ?

En se relevant, elle saisit un morceau de papier et y griffonne le nom de Carthage. Dans son sac, elle tente de récupérer quelques preuves, comme elle se l'est promis - à moins qu'elle ne l'ait promis à l'être qui s'est désintégré sous ses propres pieds.
En se demandant si elle ne préfèrerait pas oublier, elle sert son sac dans ses bras. Serre en réalité Cornelius qui s'y est réfugié. Ce soir, iels resteront muet·te·s. Demain, peut-être iels parleront de leurs découvertes, de ces preuves irréfutables de leur foi, de leurs nouveaux doutes, de leurs questions, de tous les autres mondes engouffrés on ne-sait-ou... Mais pour le moment, elle prend une grande inspiration et elle actionne le levier pour retourner dans son déni dans le hall rassurant de la Biblithèque des Quatre Mondes, alors qu'elle sent la chaleur du cinquième disparaître de sa peau.