La nuit est belle. Le vent s’engouffre doucement entre les petites casette du village, porté par le soir et le froid de l’hiver naissant. Le nez en l’air, tu contemples le ciel de deux yeux brillants, allongé sur la place du Cadran, les bras derrière la nuque dans une posture de parfaite sérénité. Autour de toi, les feux allumés accompagnent les contes des un·es et des autres, fusant comme des météores de tous les coins de l’esplanade. Tu les écoutes nonchalamment, plus concentré à épier le ciel et à somnoler doucement qu’à entendre les histoires, quoique celles-ci te manquent toujours un peu quand tu es à Cittàgazze. Les légendes ne sont plus les mêmes, elles parlent de dieu-serpent et de mythes cruels auxquels tu n’adhères pas. Les contes de ton peuple sont plus grands, plus mystérieux. Ils évoquent un passé lointain où de grands animaux survolaient le ciel et où des villes s’élançaient dans l’azur jusqu’à tutoyer les étoiles. Ces histoires sont gravées dans ton cœur, sans besoin de mots pour les entendre.

Mais alors que tu commençais lentement à t’endormir, entouré des autres analogues et des feux de joie, un sifflement strident te tira brusquement de ta somnolence. Tu te redresses vivement en te bouchant les oreilles pour ne plus l’entendre, jusqu’à ce que celui-ci s’estompe. Mais presque aussitôt, toutes les lumières de la place s’éteignirent de concert. Tu demeures quelques secondes interloqué, les yeux clignotant dans le noir, avant de te relever et de jeter un regard circulaire pour tenter de comprendre où sont les fauteur·ses de trouble. Tu es prêt à parier qu’il s’agit encore d’un tour des Flamboyants, eux qui adorent se donner en spectacle avec ce genre d’enfantillages. Pourtant, ces derniers sont davantage connus pour allumer des feux que les éteindre. Alors qui ? La suspicion te gagne, alors que tu distingues une silhouette se relever en annonçant qu’elle va rallumer les lumières, et tu reconnais la voix de Dot. « Dot ! » tu appelles en te frayant un chemin cahin-caha entre les analogues assis·es au sol. Tu rejoins finalement ton amie. « Je viens avec toi. » tu confirmes en lui emboîtant le pas.

Tu avises d’abord l’un des flambeaux près du Cadran, et tu indiques d’un signe de tête à Dot de commencer par là. Ceux-ci se trouve au cœur même du village, débuter par eux te semble la plus sensée des idées. « Viens, allons rallumer les flambeaux du Cadran. » Vous vous faufilez maladroitement entre vos camarades pour rejoindre ledit Cadran. Une fois proche du premier flambeau, tu tires de ta poche un briquet pour tenter de le rallumer. Tu parviens à tes fins après avoir lutter quelques secondes contre le vent, et le premier flambeau éclaire enfin une partie de la place, quoique sa lumière diffuse et solitaire ait quelque chose d'étrange dans ce noir étrange tombé sur le village. Que peut-il se cacher dans l'obscurité ?

Dot parvient à allumer un nouveau flambeau, et la victoire peut se lire sur son visage. Tu échappes toi-même un sourire en voyant les flammes crépiter devant vos yeux et répandre leur éclat autour de vous. D’autres analogues partent en quête de lumière et, s’appuyant sur vos premières braises, allument elleux aussi d’autres flambeaux et d’autres bougies. Bientôt, la place du Cadran est de nouveau illuminée, mais les visages demeurent inquiet et un sentiment étrange te serre le ventre, comme si quelque chose d’anormal était en train de se produire. Comme si tout ceci n’était pas la faute d’une simple panne de courant couplée à un gros courant d’air. Tu essayes de ne pas laisser l’inquiétude te gagner, quoique la situation ait quelque chose de troublant. Tu ne laisses rien paraître sur ton visage, toujours aussi flegmatique, mais au fond de toi, des doutes s’immiscent. Même les plaisanteries des Flamboyants ne sont pas aussi réussies d’ordinaire. Alors si ce n’est pas eux, qui ? Ou quoi ? Et pourquoi ce soir précisément ? Quelqu’un·e s’est-iel immiscé·e au village pour vous jouer un mauvais tour, ou pire, vous mettre en danger ? Dois-tu douter de tout le monde ?

Tu acquiesces à la proposition de Dot de prendre la torche pour aller explorer et tenter de découvrir d’où cette soudaine obscurité est partie. Vous percevez la voix d’un analogue à l’écart de la place, tentant vraisemblablement de ramener l’électricité, mais sans succès. « Allons l’aider. » tu déclares avant de rejoindre le pauvre ingénieur. Tu inspectes les fusibles à ton tour sans comprendre d’où la panne peut provenir, car tout semble intact. « C’est étrange, rien n’a bougé. » tu remarques à haute voix en reportant ton attention sur Dot. « Nous devrions accompagner les ingénieurs. » tu ajoutes lorsqu’un petit groupe se forme pour rejoindre les générateur de secours et essayer de comprendre comment ramener le courant au village. Etant les deux seul·es volontaires pour les accompagner dans cette obscurité, vous êtes rapidement missionné·es. Tu hésites toutefois avant que vous ne vous élanciez vers les générateurs ; Dot n’a pas encore la faculté de se transformer en son animal-mémoire. Si vous êtes attaqué·es par des spectres, elle ne pourra pas fuir. Les guetteur·ses et toi devrez faire diversion, mais si ça ne fonctionne pas, la jeune aschesi sera toute seule face aux fantasmi. Est-ce vraiment une bonne idée de la laisser vous accompagner ? « Tu es bien sûre de vouloir venir ? Il pourrait y avoir des spectres. » tu demandes en plantant tes yeux dans ceux de Dot. Tu sais d’avance ce qu’elle va te répondre. Tu ne pourras pas l’empêcher de s’embarquer dans cette aventure avec toi. Vous commencez alors votre ascension vers les générateurs, dans la montagne.

Évidemment, Dot souhaite vous accompagner. Lorsque tu fais mention des spectres, elle s’exclame qu’elle espère que vous en croiserez, et ça t’arrache un demi-sourire. Tu as toujours apprécié sa témérité, mais lorsque celle-ci se change en totale inconscience, tu es plus réservé. Les spectres ne sont jamais une rencontre à espérer, et tu en as déjà fait les frais dans ton expérience de faune. Il n’existe pas de créatures plus terribles qu’un spectre – si ce n’est peut-être un·e gazzi, mais les gazzi sont faciles à éliminer, alors que les fantasmi, il est presque impossible de les abattre sans le Poignard subtil. « Tu ne devrais pas te réjouir. Ils ont déjà emporté beaucoup de gens. » tu rétorques, sévère. Certaines choses ne se prêtent pas à la réjouissance ou à l’amusement ; les spectres en font partie. Tu comprends la fébrilité de Dot, et tu as toujours admiré son courage, mais parfois celui-ci est dissonant. Vous ne devriez pas espérer en croiser, ou vous serez contraint·es de faire demi-tour et de vous enfuir ; ce qui mettra un terme à votre mission et les générateurs de Coatlinchàn resteront éteints. Tu ne sais pas combien de temps le village pour survivre en étant totalement dépourvu d’électricité. Vous savez très bien vous adapter, même rudimentairement, mais certains pièges du labyrinthe fonctionnent à l’ambarisme et sans eux, Coatlinchàn pourrait être en danger.

Vous entamez l’ascension de la montagne en quête des générateurs de secours, accompagné·es des ingénieur·se·xs et des guetteur·se·xs. Mais la nuit est noire, aucune étoile ne luit dans le ciel et la lumière de vos torches ne parvient qu’à demi à éclairer vos pas, comme si l’obscurité était devenue palpable et vous enveloppait. « Reste près de moi. » tu intimes à Dot en te rapprochant d’elle pour que vos lumières s’allient. Dans cette noirceur, il est très difficile de retrouver votre chemin, même si un fin sentier existe. Rapidement, vous déviez de votre trajectoire. « Je crois qu’on s’est trompé·es de sentier. » tu déclares en constatant que tu n’aperçois plus les cairns sur le chemin. Ce n’est qu’après plusieurs détours et plusieurs dizaines de minutes de marche que vous parvenez enfin aux générateurs de secours. Immédiatement, les ingénieur·se·xs se mettent au travail, mais tu demeures sur tes gardes ; la perspective des spectres n’est pas encore écartée, vous ne devez pas baisser votre attention. Encore moins dans cette nuit de poix, dans laquelle les fantasmi pourraient se confondre.

réussite Annule un échec aux dés.

#staff

Lorsque vous parvenez enfin aux générateurs, tu avais commencé à perdre espoir de retrouver un jour le bon sentier. Les ingénieur·e·xs pourtant semblaient savoir où iels allaient, peu gagné·e·xs par l’inquiétude. Lorsque vous rejoignez les machines, iels commencent à s’affairer autour des boutons et des câbles, et tu observes leurs manœuvres sans en comprendre le moindre geste, tout en jetant des regards alentour, de peur que des spectres surgissent. Dot auprès de toi semble plus guillerette que tu ne l’es, et son enthousiasme à tout épreuve t’arrache un sourire amusé. Tu espères du fond du cœur que vous ne ferez pas de mauvaises rencontres cette nuit, mais alors que l’espoir renaît en toi, en constatant que les ingénieur·e·xs ont presque terminé leurs manœuvres, et que le village retrouve peu à peu sa lumière, que vous pouvez observer en contrebas, une étrange lueur s’allume dans la nuit, près de vous, et se rapproche de seconde en seconde. D’instinct, tu sors ta sarbacane, près à te défendre au moindre danger, car la petite lumière rouge n’a rien de la traîne sombre d’un spectre – mais elle en est presque aussi menaçante.

Peu à peu, elle se rapproche, et soudainement, la pression de l’air devient insupportable, vous contraignant à vous boucher précipitamment les oreilles pour ne pas que vous tympans explosent. Tu te rapproches de Dot et te place devant elle en barrière pour la protéger, alors que des lueurs rouges se multiplient et que tu comprends : il s’agit de dizaines d’yeux, s’ouvrant et se refermant en vous fixant intensément. Un rapide coup d’œil au village t’informe que l’immense créature menace Coatlinchàn. Il ne peut s’agir que d’un seul monstre, raconté par les voyageur·se·xs des dirigeables et par les légendes : un lambeau de Quetzalcóatl. Dot commence déjà à ouvrir le feu en jetant des pierres sur les yeux, alors que les ingénieur·e·xs vous murmurent de faire exploser les générateurs pour blesser le monstre. Pour ce faire, iels ont besoin de temps, que vous devez péniblement gagner au risque de vos vies en détournant l’attention de l’immense créature.

Alors tu lèves ta sarbacane et tu vises chacun des yeux, envoyant tes flèches empoisonnées dans les rétines. Tu n’as pas grand espoir que la neurotoxine suffira à les paralyser, mais au moins à l’affaiblir un peu. Les yeux sont son point faible, son corps écailleux et sanguinolent semblant parfaitement immunisé à vos projectiles. « Dot, attention ! » tu cries alors que les yeux se rapprochent dangereusement de ton amie. D’un coup sec, tu envoies l’une de tes flèches empoisonnées dans la rétine qui se rapprochait de la jeune femme, désespéré en voyant d’autres yeux, toujours plus nombreux, vous prendre en tenaille. Le corps est en train de se refermer sur vous comme un piège, alors que les ingénieur·e·xs sont toujours en train de s’affairer auprès des générateurs. Il faut encore gagner du temps.

sarbacane Les dards empoisonnés qui l'accompagnent peuvent immobiliser tout animal ou personne en moins de trois minutes.

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